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Initiatives & témoignages
22 juin 2020
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Témoignage d’un parent expert de l’accompagnement

Le quotidien d’Emmanuelle Deroubaix n’a guère été bouleversé par la crise sanitaire, car elle assurait déjà la prise en charge à domicile de son fils de 16 ans en situation de polyhandicap. Cette habitante du Loir-et-Cher fourmille d’idées pour favoriser ce type d’accompagnement.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées pendant la crise sanitaire dans l’accompagnement de votre adolescent de 16 ans en situation de polyhandicap ? 

Notre rôle d’aidant était déjà très abouti, ce qui nous a aidés à mieux affronter le confinement. Nous avons en effet retiré Alexis de son établissement il y a trois ans. Il souffre d’un polyhandicap particulièrement lourd ce qui avait fini par rendre impossible sa prise en charge médicale en IME.

Alexis a besoin d’un suivi 24h sur 24 et nous ne souhaitions par le placer en internat, la seule alternative possible sur notre territoire. Je suis aidante à plein-temps depuis huit ans et avec mon mari, nous nous sommes organisés à domicile avec une équipe de professionnels libéraux.

Quel a été l’impact de la pandémie sur votre organisation quotidienne ?

Notre médecin traitant nous a appelé le 7 mars pour nous avertir des risques inhérents à l’épidémie de Covid-19. A partir de ce moment, nous n’avons plus eu la visite d’aucun professionnel à domicile et nous avons dû renoncer aux séances de psychomotricité. Une de mes deux filles, Léa, 20 ans, a choisi de se loger en appartement, en raison de son activité d’aide -soignante dans un Ephad. Mon conjoint a pu m’épauler grâce au dispositif mis en place en faveur des salariés vivant avec une personne vulnérable. Tant que ce mécanisme est maintenu, nous maintenons cette organisation familiale, en raison de la fragilité d’Alexis.

Quelles situations ont été les plus difficiles pour vous ? 

En un sens, le confinement a été du pain béni, car les vidéos de professionnels se sont mises à pulluler sur internet. Elles m’ont permis de reprendre des massages au niveau de l’oralité, etc.  La formation que j’ai suivie il y a trois ans m’a également poussé à organiser une séance de gymnastique quotidienne pour Alexis.  J’ai pu pallier aux trois séances hebdomadaires de kiné respiratoire, car je maitriser les rudiments pour gérer les encombrements et les départs en vacances.

La plus grande difficulté demeure la solitude, le manque de soutien de professionnels extérieurs capables de confirmer nos intuitions, de nous assurer une soupape de secours.

Qu'attendez-vous pour que votre futur soit plus serein ?

Les professionnels de santé nous ont toujours dit de rester à notre place de parents, mais dans les faits nous faisons partie de l’équipe ! Je pense qu’il faudrait davantage encourager les familles qui souhaitent s’investir dans la prise en charge médicale de leurs enfants en situation de handicap. En effet, nous nous retrouvons parfois très démunis seuls à domicile. 

Selon moi, il faudrait également créer un cadre plus favorable, afin de développer la prise charges médicalisée à la maison. Les services d’aides à la personne refusent ce type de prestation, car leurs personnels ne sont pas formés. C’est pourquoi nous avons recruté nous-même et fait former une aide médico-psychologique ainsi qu’une aide-soignante. Elles nous relayent deux nuits et une journée par semaine et son autorisés à titre dérogatoire à pratiquer certains gestes infirmiers. 

Il serait aussi intéressant de décloisonner les établissements, afin de pouvoir nouer des partenariats avec les Ehpad qui disposent de professionnels et d'infrastructures utiles aux personnes en situation de polyhandicap. De même, nous sommes à une heure de route d’un espace sensoriel snoezelen, alors que de nombreux Ehpad en bénéficient.

Propos recueillis par Philippe Bohlinger

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